Le Rubicon est franchi !
Avec l'aimable autorisation de l'auteur |
Mon père, que j'adorais, nous a quitté il y aura bientôt un an, le 25 juillet, et il ne se passe pas un jour, depuis cette date, sans que je pense à lui ou que la vie quotidienne, elle-même, m'en procure l'occasion et ce fut le cas, et c'est peu de le dire, au soir des élections Européennes !
Mon père n'était pas un adepte des expressions grossières ou triviales à l'exception d'une seule, imagée, très expressive et qu'il prononçait volontiers lorsqu'une succession d'erreurs ou de sottises conduisait à une catastrophe parfaitement prévisible.
Et le dimanche 25 mai, à vingt heures, devant le brillantissime résultat des élections européennes, je ne peux pas l'imaginer marmonner autre chose que son célèbre et familial...
"A force de jouer au con, on tombe sur le cul ! ..."
Même en restant poli et élégant, il est difficile de ne pas avoir la même analyse face à un résultat que le Parti Socialiste et l'UMP semblent avoir été les seuls à ne pas voir arriver alors qu'il était parfaitement logique et qu'une telle cécité, face aux événements, me plonge dans un abime de perplexité.
Cela fait pourtant trente ans, trente et un ans pour être précis, que le Parti Socialiste, obnubilé par son désir de diviser la Droite, a usé et abusé d'un Croquemitaine qu'elle a gaillardement contribué à créer et auquel, par dessus le marché, elle n'a eu de cesse de faire prendre des forces et, donc, un poids électoral croissant.
Un stratagème qui a eu son heure de gloire, son efficacité et, très probablement, assuré les beaux soirs de la rue de Solferino tant que la bête immonde ne s'est nourrie que des seules et uniques voix de droite.
Seulement voila, il devenait pourtant flagrant que cette vilaine bête commençait à séduire également un électorat populaire qui, bien que vivier électoral traditionnel de la gauche, avait l'outrecuidance de ne plus être convaincu par l'apport sociétal "bénéfique" d'une immigration lui paraissant incontrôlée, par le charme d'être en première ligne du multiculturalisme et, dans le même temps, par une Europe semblant être responsable de tous les maux.
Ne négligeons pas, dans ce fiasco électoral, la responsabilité d'une droite dont la combativité a été telle que, pour faire barrage au Front National, elle a bien souvent préféré se saborder ou, plus lamentable encore, était convaincue de gagner puisqu'elle respectait, au pied de la lettre, les règles du jeu édictée par ceux qui souhaitaient la voir perdre. Ce qu'elle fit, d'ailleurs, avec répétition et constance tout en permettant aux détenteurs de la bonne pensée de jouer avec le feu et favoriser l'apparition de ce qu'il faut bien appeler ...
Le ressenti "populaire".
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Même si c'est faux, il suffit de tendre l'oreille dans la rue, à une terrasse de café ou dans le moindre lieu public où les conversations vont bon train, pour prendre conscience du fait que l'électeur "moyen", et même très moyen parfois, finit par être convaincu que, pour reprendre la célèbre phrase de Coluche, si nous sommes tous égaux... certains le sont plus que d'autres.
A la seconde où ce ressenti populaire, aussi irrationnel qu'une vulgaire allergie aux fraises ou au poils de chat, n'est pas démenti par des faits ou, mieux encore, par des chiffres indiscutables, le mal est fait et la gangrène va se généraliser en donnant raison à un certain Montesquieu pour qui "le droit à la différence menait rapidement à la différence des droits"...
Un Montesquieu que la gauche d'aujourd'hui considèrerait, sans aucun doute, comme un maître à penser Frontiste et que, de son côté, l'électeur du Café du Commerce risquerait fort de prendre pour le nom d'un cheval du tiercé de dimanche !
Je garde en mémoire un spectacle auquel j'avais assisté, il y a une bonne dizaine d'années, dans un wagon de métro. Quatre "djeunes", comme on dit maintenant, étaient là, plutôt costauds, les pieds sur les banquettes, casquettes à l'envers et en train de fumer ostensiblement d'une manière ostentatoire...
Inutile de décrire les regards des autres passagers, pourtant bien plus nombreux qu'eux, mais personne n'a osé faire la moindre réflexion, sans doute pour éviter d'être, immédiatement, traité de raciste puis, ensuite, se faire démolir le portrait. Et, là, je me suis pris à imaginer la même scène mais avec quatre jeunes cadres, costume-cravate-attachée-case et propres sur eux... Je peux me tromper, mais je suis intimement convaincu que, là, ça n'aurait pas duré longtemps !
A la seconde même où une quelconque forme de "peur" s'installe, le phénomène de rejet n'est pas loin et, contrairement au radotage culpabilisant de nos chantres de la bien-pensance, il ne s'agit en aucun cas de "racisme", au sens étymologique du terme, mais du banal rejet de celui qui, argotiquement, "la ramène un peu trop". Xénophobie, sans doute un peu également, mais ne serait-ce qu'à la campagne, lors des bals du samedi soir, l'étranger est tout simplement celui du village d'à côté alors si, en plus, il revendique le "droit à la différence", la cause est entendue...
Cette apologie du "droit à la différence" va nous coûter cher en terme de communautarisme alors qu'un certain Kofi Yamgnane, pourtant secrétaire d'État chargé de l'Intégration auprès du ministre des Affaires sociales et de l'Intégration de 1991 à 1993, conseiller régional de Bretagne de 1992 à 1997 et député socialiste du Finistère lors de la XIe législature de 1997 à 2002, prônait, pour sa part, une "obligation à la ressemblance".
En France, s'il est évident que les scrutins nationaux ne sont pas entachés de fraudes électorales majeures, il est tout aussi clair que le "quatrième pouvoir", constitué par nos médias, participe à nous tenir "quelque peu" la main avant de glisser le bulletin fatidique dans l'urne. Or, et là je m'adresse à nos brillants stratèges politiques, comment aviez-vous l'illusion d'être et, surtout, croire demeurer les maîtres d'un jeu dans lequel l'électeur de base n'est fait que de profondes contradictions, à l'exemple de mes regrettées grand-mères qui, toutes les deux, votaient communiste.
Oui, communiste l'une comme l'autre, alors que la première, d'un milieu plutôt modeste, était une lectrice assidue du "Parisien Libéré" et clamait, haut et fort, "La France aux Français" tandis que la seconde, elle et d'un tout autre niveau social, se rendait au bureau de vote en voiture américaine décapotable, d'un fort joli bleu métallisé, chauffeur à casquette au volant, et accomplissait son devoir électoral en manteau de vison. Des attitudes assumées, certes, mais autrement plus proches de la logique floue que d'une cohérence mathématique et prévisible, or c'est bien en pensant mettre l'opinion populaire en équation que l'on assiste à des Bérézina comme celle du 25 mai dernier !
Entre un Parti Socialiste qui a délibérément, et par calcul, tout fait pour faire "monter" le Front National en brandissant, parmi quelques autres grosses ficelles, l'inusable "droit de vote des immigrés" afin de provoquer, sciemment, des poussées d'urticaire électoral et, de l'autre, une UMP qui n'a jamais osé franchir le pas et revêtir, enfin, les habits du dermatologue...
Entre un candidat socialiste qui a tout promis, absolument tout, sans pouvoir honorer ses promesses et qui s'en trouve réduit à reprendre d'une main ce qu'il vient péniblement d'accorder de l'autre et une UMP orpheline du moindre projet et, provisoirement, d'un leader charismatique, l'électeur moyen revit les affres des héros de "Gravity", abandonnés dans un vide intersidéral...
Entre un Gouvernement qui n'a plus de socialiste que le nom, qui a pour le moins déçu son électorat traditionnel au point d'aboutir à une cote de "popularité" telle que l'on n'en a jamais vue sous la Cinquième République et, de l'autre, une UMP partagée entre sombres affaires financières et quelques "Iz No Good" qui veulent être khalife à la place du khalife tout en détruisant, jour après jour, le Khalifat sur lequel ils entendent régner...
Entre un Premier Ministre, souvent surnommé le "petit Sarkozy de gauche", qui, avec un immense courage, annonce une réduction des dépenses de l’État, du nombre des régions et quelques autres petites réformes constituant autant de "casus belli" pour les gardiens du Temple Socialiste, à l'image des cheminots ou des intermittents du spectacle, et une UMP qui refuse, maintenant, de voir faire ce qu'elle voulait faire mais que ceux qui le font maintenant l'ont empêché de faire...
Bref, entre ces deux principaux partis qui, chacun à sa façon, ont joué à ce que disait mon père, il était évident, cette fois, que les mécontents de l'Europe et ceux de l'immigration allaient se donner la main et porter leur suffrages sur le seul parti qui, à défaut de programme réel, reprend à son compte le rôle de fourre-tout du malheur des autres comme savait si bien le faire Macha Béranger dans son émission culte "Allo.... Macha...."